Un coin tranquille pour mourir d’Yvonne Besson

Marville est une petite provinciale de la côte normande. Mais depuis peu un enchaînement de différents faits divers laissent supposer l’existence d’un « serial killer » dans la bourgade. Le premier meurtre est celui d’une paysanne « inutile » égarée dans le bocage normand à laquelle personne ne prête pas attention. Le meurtre passe dans les « canards locaux » comme un fait divers. Mais le lecteur est entraîné par l’auteur, Yvonne Besson, dans le pathos de son tueur. Le récit est coupé de morceaux du journal intime qui explique les motivations de l’assassin, une sorte d’introspection expliquant les raisons de ses actes et le plaisir croissant qu’il éprouve à chaque meurtre. Je cite dans un billet précédent « pensées sombre du dimanche soir…sur la nature humaine » la vision quelque peu pragmatique du tueur sur la nature humaine. Le second meurtre se déroule dans un collège où un jeune professeur stagiaire, lui-même inutile, se suicide ou « est suicidé… ». L’auteur, elle même enseignante, fait passer ici un certain nombre de messages sur l’école et l’administration qui la supporte. Toutefois ces messages sont au second plan par rapport à l’évolution du tueur et de l’enquête pour sa traque. Mais les critiques sont justes. Le troisième meurtre est celui d’un handicapé, mari d’une professeur de Lettres au collège Aubin Corbier – collège de la ville – lui aussi également inutile. Le quatrième assassinat est celui d’un enfant poussé sous une voiture, enfant qui se trouvait là au mauvais endroit et au mauvais moment mais jugé inutile par le tueur. Le cinquième meurtre est quant à lui l’assassinat d’une professeure du collège déjà cité.

L’enquête est confiée au commandant Riou, femme policière, mutée de Marville à Rouen. Les femmes qui prennent du galon existent… Ce flic est la petite amie du libraire de la ville chez qui tous les professeurs de Marville viennent « s’approvisionne »r. Elle doit mener ses investigations dans la corporations enseignante, lieu de toutes les passions liées à ce métier et support des messages de l’auteur sur l’école. Les chapitres du roman nous laissent avancer avec elle dans son enquête. Le lecteur pense toujours avoir affaire avec le tueur en série mais, plus le lecteur va vers la fin du livre, plus ce qui semblait évident ne l’est pas. Le récit fait apparaître deux histoires parallèles : une simple histoire familiale expliquant l’un des meurtres et un récit fictif s’inspirant de faits divers produits dans la région pour les autres. Grosse déception à titre personnel… Je préférais l’hypothèse du tueur en série.

J’admire les qualités de l’auteur dans son écriture qui fait tomber le lecteur dans le piège du tueur en série pendant les deux tiers du livre. Toutefois l’ouvrage s’allonge et sa lecture devient fastidieuse au bout de trois cents pages. Le lecteur dans ce genre d’ouvrage souhaite à mon avis un dénouement rapide. C’est à titre personnel la faiblesse de l’ouvrage. Mais c’est aussi sa force car la conclusion est pour le moins déroutante et est « tirée par les cheveux ». Je pense que le public cible idéal de ce roman sont les enseignants du secondaire amateurs d’histoires policières. Par contre, j’ai particulièrement aimé l’introspection du tueur qui est fine. Sa propre analyse est à la fois pertinente et traduit parfaitement son escalade dans le plaisir. Personnellement, c’est tous les passages où notre tueur hypothétique s’analyse qui m’ont le plus plu. Cela m’inquiète…


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