Archive pour la catégorie ‘Lectures’

Un côte d’émeraude livresque 2015

Vendredi 2 octobre 2015

Si l’été est propice aux romans policiers, je me suis inscrit dans la vague et ai lu quelques polars bretons ayant pour cadre la Bretagne, plus précisément la côte d’Émeraude, dont je me fais l’écho ici.

En premier lieu, j’ai eu le plaisir d’acheter le livre Saint Michel, Priez pour eux de Jean-Pierre Alaux. Fin des années 70, Séraphin Cantarel, conservateur au Ministère de la Culture, est envoyé en mission pour préparer le dossier de l’UNESCO d’ajout du Mont Saint-Michel au patrimoine de l’humanité et procéder aux restaurations nécessaires : la flèche et l’archange notamment. Avec son jeune assistant Trelissac, il doit mener à bien cette opération. Mais les ennuis s’amoncellent. L’Amoco Cadiz, énorme pétrolier, vient de faire naufrage. Notre héros craint que sa cargaison vienne souiller la baie. A cela s’ajoute le cadavre revêtu d’une bure semblable aux occupants de l’abbaye. Voilà qui fait du plus mauvais effet ! La presse locale s’empare de l’affaire. Notre héros, aidé de son assistant, réalise à la fois la restauration et l’enquête.

Par un jeu de dialogues savamment construit, l’auteur invite le lecteur a plongé dans l’histoire du Mont-Saint Michel, merveille du monde chrétien occidental. C’est cette Histoire mise en second plan et distillée brillamment dans l’intrigue romanesque qui m’a passionnée. Les péripéties s’enchaînent rapidement ce qui donne à ce roman – à mon sens – le qualificatif de polar historique. N’étant pas un fan des romans policiers ou des polars, j’ai trouvé que la mise en place du décor n’était pas trop longue et que le lecteur rentre vite dans l’enquête, idéal en ce qui me concerne. J’ai plongé dans le Mont grâce à Séraphin (un ange :-) ) et j’ai parcouru ce livre à la vitesse d’un cheval au galop. Sa lecture m’a fait penser – pour le style – à la série de roman Le Saint de X dans le rythme et l’intrique. Dans tous les cas, je me suis régalé !

40 kilomètres plus loin, vers l’ouest (rien de nouveau), moins à vol d’oiseau, rien ne va plus à Cancale. En moins de trois semaines, deux personnes décèdent après avoir mangé des huîtres empoisonnées, une troisième en réchappe de peu. Dans la perle noire de Cancale, Anne Chambrin nous entraîne dans l’univers ostréicole cancalais. Elle nous fait découvrir l’ambiance de cette ville côtière vivant au gré des marrées. Cancale dépend des huîtres et des touristes qui les attirent. Il faut trouver rapidement l’origine de ce fléau. Estelle Y, policière à Saint-Malo y est dépêchée pour résoudre ce mystère aqueux.

Dynamique et pétaradante, l’auteure par les yeux de son héroïne nous dépeint une série de personnages, symboles du microcosme de cette  ville et de l’atmosphère qui y règne. Par cette galerie, les lecteurs ayant parcouru le port de la Houle, la pointe du Grouin et la plage du Verger se transposeront sans aucune difficulté dans la cité ostréicole. Ils y sentiront l’iode s’exhumant des pages et le goût de l’huître fraîchement sortie de la mer. Personnellement, comme écrit juste avant, j’ai bien ressenti cette ambiance hivernale propre à la baie du Mont Saint-Michel.

Toutefois j’ai trouvé que le rythme était lent et que l’intrigue tirait trop en longueur se terminant par un dénouement brutal. En somme c’est un roman qui se lit pour l’ambiance et non son intrigue. Le roman aurait gagné à être plus court. Conclusion : oui pour l’ambiance et les paysages, non pour l’intrigue policière.


Cédric Beucher


Verbicide : Du bon usage des cerveaux humains disponibles de Christian Salmon

Samedi 24 août 2013

Veribicide - du bon usage des creveaux humains disponibles

Le temps du récit est révolu, le temps de l’anecdote est venu (après les attentats du 11 septembre 2001). Christian Salmon, dans cet essai Verbicide – du bon usage des cerveaux humains disponibles, édition actualisée paru chez Actes Sud en 2007, présente sa réflexion sur l’introduction du storytelling dans la communication actuelle. Le storytelling est la discipline (ou outil) qui consiste à raconter des histoires ou à transformer tout type de message en histoire. Dans cet ouvrage, il montre comment sa mise en œuvre dans tous les pans de la vie quotidienne du citoyen ordinaire influe et modifie son comportement. Il le démontre par les prismes de la linguistique, de l’organisation et de la construction des messages créés et diffusés par les médias (TV, radio, internet, etc), de la censure subie et construite par l’individu lui-même,  et les politiques culturelles mises en œuvre par les différents échelons de l’état.

Il parle de mise en avant du « je ». Les réseaux sociaux nous facilite d’autant plus la tâche : Facebook, Twitter, Pinterest, Foursquare, Flickr, Instangram, Tumblr, etc. Un concept était apparu ces dernières années : celui du personal branding. Il est fait de soi l’une marque. Concept construit dans un premier temps pour l’univers professionnel (voir à ce sujet l’ouvrage d’Olivier Zara : Réussir sa carrière grâce au personal branding : Gérer son identité et sa réputation professionnelles [1]), il s’étend désormais à la sphère personnelle.

Il démontre que, dans une société où tout s’accélère, le temps consacré à l’abstraction devient nul. L’homme vis à présent dans un monde d’anecdotes immédiates sans la présence du recul symbolique nécessaire pour en percevoir leurs portées. L’individu devient fournisseur de données brutes sans prendre la mesure de ce qu’il diffuse et de la valeur ajoutée de ces données (recul sur ce qui est communiqué). Ce « je » ou le renforcement de notre ego, face à un environnement socio-économique méprisant de plus en plus la personne, répond à cette soif de reconnaissance à laquelle tout à chacun inspire (pyramide de Maslow).

Il aborde également la diminution drastique du langage utilisé. Il ne faut pas nier son évolution. Le dernier ouvrage d’Eric Orsena, La fabrique des mots, dans son chapitre 14, « Où l’on reçoit de la visite, peut-être même des renforts, l’illustre parfaitement (lecture estivale:-)) [2]. Toutefois la diminution du nombre de mots utilisés entraîne une absence de réflexion du citoyen car le nombre d’outils mis à sa disposition pour exprimer sa pensée est d’autant plus réduit. Il insiste surtout sur la construction volontariste de cette régression.

Je cite l’ouvrage d’E.Orsena :

« Les bons dictionnaires racontent la vie de chaque mot….
- et avec tous ces mots, tu peux construire les histoires que tu veux. Comme un maçon.Tu imagines quelle maison folle il pourrait bâtir avec tant de briques. Les mots sont des briques, Jeanne, nos briques ! Les briques de nos phrases.Les briques de nos rêves. Les briques de notre fantaisie, les briques de notre espérance.

Logo du télécrochet  : Loft Story

Logo de l'émission : Loft Story

Tout en montrant les différentes censures auxquelles le citoyen est assujetti, l’auteur monde comment cette construction volontariste censure elle-même le citoyen. L’immédiateté cède la place à l’expérience. Le symbole disparaît au profit d’un « prêt à penser » élaboré savamment par ceux qui construisent une société où la réflexion et le recul n’ont plus leur place .

Cet opus est en conclusion, une alerte, où par le truchement du storytelling, le citoyen n’est plus acteur de la société mais consommateur des données qu’on lui donne au biberon.

Cédric Beucher

Bibliographie :

[1]
E. Orsenna, La fabrique des mots. Paris: Stock, 2013.
[2]
O. Zara, Réussir sa carrière grâce au personal branding: gérer son identité et sa réputation professionnelles. Paris: Eyrolles, 2009.


La Fabrique du Crétin : La Mort Programmée de l’école de Jean-Paul Brighelli

Mercredi 2 janvier 2013

La rentrée scolaire traduit la fin de l’été. Tous les médias nous assènent en ce début du mois de septembre de tous les sujets possibles et inimaginables sur l’école : son rythme, la gestion du stress des élèves, etc.

J’avais envie ici d’évoquer dans cette période une lecture estivale (réalisée pendant les vacances) d’un essai de Jean-Paul Brighelli intitulé : la Fabrique du Crétin : la mort programmée de l’école. Fréquemment, il est coutume de dire que le système scolaire français est mauvais. Cette affirmation est prouvée dans les enquêtes internationales notamment l’enquête PISA réalisée par l’OCDE. Cet essai montre de manière réfléchie que le système n’est pas le coupable. Il est un outil. Ceux qui le manient depuis une trentaine d’année le démontent sciemment pour produire un peuple où la critique est nulle. C’est un argumentaire dénonçant l’ensemble des mesures successives qui ont conduit l’école dans sa situation et surtout que c’est une démarche consciente et volontaire d’abrutissement de la population.

L’auteur, Normalien et agrégé de Lettres, est lui même un acteur du système. Il parle donc en connaissance de cause. Il détermine quelques grands thèmes macro et micro, fondements de son raisonnement :

Les causes exogènes :

  • une élite dirigeante désirant des individus simples à manipuler. C’est bien connu ! Plus le peuple est instruit, plus il prend en main son destin,
  • un marché économique ne voulant pas d’une main d’œuvre qualifiée mais spécialisée, des travailleurs sans conscience sociale où la revendication est inexistante,
  • le lobbying des industriels auprès des autorités scolaires en insistant sur l’intérêt (pédagogique) mercantile de tel outil dans l’apprentissage,

Les causes endogènes :

  • la ghettoïsation et l’absence d’élévation de niveau dans les établissements localisés dans les zones difficiles (étude de la culture de sa cité par exemple, où sont les penseurs ou les grands classiques de la littérature) ?
  • une pédagogie plaçant l’enfant au centre de son apprentissage, l’enseignant n’étant qu’un accompagnant ou un guide (lire à ce sujet l’ouvrage de Rachel Boutonnet : journal d’une professeure clandestine précédemment commenté dans le blog),
  • la « technicisation » des savoirs où les concepts deviennent des mots abscons pour le commun des mortels,
  • l’apparition de disciplines rendues obligatoires pour lesquelles les enseignants ne sont pas formés,
  • la massification de l’accès aux diplômes : 80% d’une classe d’âge au bac et plus récemment 50% d’une classe d’âge au niveau licence (plan Pécresse),
  • Mise en place du socle commun de connaissances et  de compétences où le savoir n’est plus noté mais les compétences,
  • les sorties, objets de mode dans et entre les établissements (dévoreuse de temps à organiser) et où les responsabilités reposant sur les accompagnants deviennent accablantes (exemple : autorisation parentale requise pour mettre de la Biaphine à un enfant atteint d’un coup de soleil, etc.),

Chaque item fait l’objet d’une mise en situation et est argumenté de manière efficace avec des exemples concrets. L’auteur invite les penseurs et les acteurs du système  « à un retour en arrière » non emprunt d’une nostalgie passée ou réactionnaire mais simplement à des méthodes efficaces et éprouvées qui dans le passé ont donné de bons résultats.

Conclusion : son essai dévoile les causes endogènes et exogènes de l’état actuel de l’école. Au lieu d’être un réquisitoire à charge, il diagnostique les cause de cet échec pour mieux les résoudre. En bref, il ne s’agit pas d’un énième ouvrage réactionnaire mai d’une mise en exergue des raisons pour inviter les concepteurs du système éducatif (ensemble de tous les acteurs) à réfléchir à une école qui n’oublie aucun de ses usagers.


Cédric Beucher

Le noeud de vipères de François Mauriac

Mercredi 2 janvier 2013

François Mauriac, dans son Nœud de Vipères, nous livre la confession d’un patriarche avar – Louis – d’une famille bourgeoise de la belle époque. Il, à l’aube de sa mort, écrit une confession – un journal intime de sa vie ? - y décrivant tous les stratagèmes pour déshériter ses enfants. L’argent est l’élément catalyseur. Il y est dépeint surtout les relations humaines entre ce vieillard, sa femme et sa descendance.

François Mauriac, avec un style percutant, dépouille de manière acide les sentiments de ses protagonistes : l’avarice de Louis, son machiavélisme et celui de ses enfants, la religion (alibi obligé et garant d’une respectabilité). Il parle de « devoirs » et « d’obligations ». D’autres y verront un refuge face aux difficultés de la vie (abandon, décès, etc.). Le silence où l’amour est oublié au profit d’une vénalité. Ce silence où rien ne se dit : aucun sentiment ne se partage. Et pourtant l’amour se fraye un passage dans le cœur de Louis, ce nœud de vipères, vers un neveu et fils illégitime qui, il l’espère, rachètera la conduite de ses enfants.

La fin du livre montre le revirement de Louis. Ses enfants, Louis et Geneviève, héritent ou plutôt leur père capitule et abandonne la fortune familiale, fruit d’un labeur savamment acquis. Si certains y verraient la grâce tombant comme une auréole sur Louis, ses enfants s’interrogent si cela n’est pas l’ultime stratagème d’un vieillard mourant. La toute fin du livre est un échange de correspondance entre les deux enfants : Louis et Geneviève. Louis découvre la confession intime de son père et l’envoie à sa sœur comme témoignage de la cruauté de son père et de l’image de ces enfants.

Ce roman narre tout simplement l’homme avec ses faiblesses. Dans un roman court, l’auteur nous renvoie notre propre image sans aucune déformation : noire, acide et profondément vraie. Son style m’a transporté et est une invitation à lire son roman d’une traite. J’apprécie cette description sombre de l’homme souvent cachée ou déformée dans nos sociétés (il rejoint la perception d’Emil Cioran sur l’homme) . Il a l’intensité des luttes que l’on peut voir entre des enfants quand des parents disparaissent. L’héritage devient l’élément catalyseur. Les vraies personnalités émergent. Et la nature reprend ses droits !

Le Noeud de Vipères est profondément français, humain et moderne.


Cédric Beucher

Journal d’une institutrice clandestine de Rachel Boutonnet

Jeudi 20 septembre 2012

L’Institut Universitaire de Formation des Maîtres (IUFM) a remplacé au début des années 90 l’Ēcole Normale. Mais est-ce une école normale ? Pour rappel, les IUFMs forment

Couverture du livre du Journal dune institutrice clandestine de Rachel Boutonnet

les professeur(e)s des écoles (les ancien(ne)s instits), les professeur(e)s certifié(e)s (les enseignant(e)s du secondaire) et les agrégé(e)s. Cet institut, en deux ans, prépare lors de la première année au concours. Les lauréat(e)s du concours deviennent alors stagiaires et passent en seconde année pour affronter leur stage et devenir « titulaire ». D’autres peuvent directement arriver en seconde année ayant passé le concours « en candidat libre ».

Dans son ouvrage, Journal d’une institutrice clandestine, Rachel Boutonnet, traite de son année de stage à l’IUFM dans un carnet de bord, un journal intime : témoin et confident de tous ses maux et émotions. Elle y dépeint une institution à double discours. D’un côté celui fondé sur les sciences de l’éducation où tout un vocabulaire technique et savant s’est construit, qui rend celui qui le maîtrise, « formateur/expert ». De l’autre celui qui ignore la réalité d’un terrain et qui pense que toute vérité se construit non pas par l’expérience mais par le fruit d’une pseudo-science évoquée juste avant. Ainsi elle déclare : « Je me trouve pour un an dans le bastion de la peur et de la haine du savoir, de l’ignorance fière d’elle-même et arrogante. Le credo est ici : « Moins on sait, plus on est intelligent et mieux on sait ce qu’est apprendre et enseigner ». On oublie que les verbes « apprendre et enseigner » sont transitifs. Cette phrase me fait penser à une expression utilisée autrefois pour qualifier l’institution militaire – la grande muette – . Elle s’applique aux deux protagonistes (les formés et l’institution) : les formés contraints à un mutisme forcé et l’institution qui refuse de réfléchir sur son essence propre face aux critiques des personnes qu’elle prépare.

Elle évoque dans son journal le combat d’une année entre son désir de rester elle-même et de faire part de ses idées dans un débat constructif et le refus net de l’institution et de ses représentants de toute discordance par rapport à la doctrine officielle. Toute rébellion est une remise en cause de la titularisation (entrée dans la fonction publique). Elle y dit que l’institution se centre sur la forme et non  le fond et ne communique pas aux stagiaires les éléments qui leur permettront d’aborder leurs premières années d’enseignement.

Parmi les morceaux choisis dont ce livre regorge, j’en ai retenu quelques un que je vous livre ici :

  • « Qu’il faut savoir imposer des connaissances, mais « qu’argumenter est aussi fondamental ». Elle (une enseignante)  explique que « les enfants sont d’autant plus enclins à écouter qu’on aura respecter leur besoin de bouger »,
  • « Selon la façon dont on traite le sujet, on peut en effet susciter l’intérêt et ainsi motiver les enfants. Il est important aussi que les enfants élaborent eux-mêmes la trace écrite qu’il auront à retenir ».

Ces citations illustrent le principe que l’enfant est au centre de l’apprentissage et que tout se construit autour et avec lui… Les tenants de cette approche moderne, ces chercheurs en pédagogie, oublient qu’une évaluation centrée sur les compétences et non sur les savoirs engendre des situations d’échecs tragiques. Naturellement, ces citations sont extraites du contexte et devraient être remises dans leur situation d’origine. Toutefois elles éclairent à mon sens ce que l’Ētat, le Marché – malgré un discours positiviste permanent – souhaite pour sa jeunesse.  Je vous invite à lire ici l’essai intéressant de Jean-Paul Brighelli : la fabrique du crétin ou la mort programmée de l’école.

L’auteur fait preuve d’une maturité impressionnante aussitôt l’obtention de son concours. Son journal, dans des mots simples, fait transpirer ses gouttes de souffrance entre sa conception de ce que devrait être le métier et la vision idéaliste institutionnelle. Cette schizophrénie est toujours présente tout au long de son année.

La seconde partie du livre – après celle du journal  – est un ensemble de réponses issues de la réflexion de Rachel Boutonnet aux énormités entendues à l’IUFM.

La dernière partie du livre est celle de ses trois premières années d’enseignement où elle relate notamment son expérience d’apprentissage de la lecture à des élèves de CP. « Clandestinement », elle acquiert des ouvrages sur ses deniers propres pour combler les lacunes de certains de ses « apprenants ». Or pendant un remplacement, un inspecteur découvre la chose et lui décoche un rapport cinglant lui signifiant durement les erreurs de ses choix, la fraude contre la doctrine institutionnelle le tout allant à l’encontre selon l’inspecteur des apprenants.

Pour conclure, loin d’être réactionnaire, cet ouvrage est la réflexion mature d’une professeur sur sa formation avant son départ dans les écoles. Elle y dénonce l’hypocrisie entre la liberté pédagogique de l’enseignant et l’invitation d’adhésion à la doctrine institutionnelle voulue par les formateurs des IUFMs. Il ne s’agit pas d’une charge mais d’une réflexion à repenser la formation des professeurs. Un témoignage ahurissant expliquant en partie le niveau intellectuel de la jeunesse actuelle. Je tiens tout de même à préciser que ce livre a été écrit il y a une dizaine d’années. Depuis les IUFMs ont été intégrés dans les Universités. Pour passer le concours, un postulant doit être titulaire d’un master en enseignement (niveau bac+5) contrairement à une licence auparavant (niveau bac+3). Certains y voient des mesures d’économie : précarisation des statuts par la constitution d’un vivier important de contractuels. Gageons que ces changements offriront aux individus se destinant aux métiers de l’enseignement une formation repensée et des personnes heureuses de construire un peuple sensé et critique avec une conscience politique.

Cédric Beucher


La forêt des pendus de Liviu Rebreanu

Jeudi 1 septembre 2011


La forêt des pendus est l’histoire d’un soldat roumain, Apostol Bologa, se battant dans l’armée hongroise durant le premier conflit mondial. Il est bon de rappeler ici que la Transylvanie, région où se déroule l’histoire n’est pas encore roumaine. Au début du roman Apostol est juge dans une cour martiale pour juger un camarade qui sera pendu. Du statut de bourreau et d’héros de guerre (plusieurs médailles gagnées au combat), il deviendra lâche aux yeux de ses camarades puis déserteur refusant de juger des soldats de sa propre nationalité en fin d’ouvrage.

Le roman est plus intéressant sur les tribulations de l’âme du héros que la trame en elle-même. Liviu Rebreanu nous livre ses réflexions sur la nature humaines par l’entremise des pensées de son héros. Et c’est là, toute la force du livre. Abordons cette réflexion. En premier lieu, la première conception de la vie de notre héros se forge au contact de son père : dur, froid et distant. Son père, prisonnier politique, lui déclarera à la fin du lycée : « Mon fils, tu es un homme à présent. Tu es prêt, s’il le fallait, à gagner ton pain par tes propres moyens. Tu vas entrer dans le cours supérieur et ton horizon va s’élargir. Tu comprendras beaucoup de choses impalpables car le monde et la vie sont pleins de terribles mystères. Efforce-toi toujours de gagner l’estime des autres et d’abord la tienne propre. Pour cela, il faut que ton cœur soit toujours en accord avec tes pensées, tes pensées avec tes paroles, tes paroles avec tes actes ; c’est ainsi et ainsi seulement que tu deviendras à établir un équilibre durable entre ton mon intérieur et le monde extérieur ! ». On voit ici le modèle de droiture qu’il lui est donné. Un idéal ou une utopie ? Peut-être. Néanmoins la conciliation du coeur et de la raison apparaît comme un préalable à l’équilibre. Le père du héros nous donne aussi l’enchaînement juste : pensées, paroles et actes.

Notre héros part ensuite à l’Université mais la guerre survient. C’est donc avec ce terreau paternel et universitaire que Apostol, soldat, découvre dans la guerre la nature humaine. Fier de son devoir, il s’interroge si sa place n’est finalement pas dans l’armée roumaine au moment où il apprend que sa division est mutée (changement de position) pour aller se battre contre « ses frères roumains ». Il cherche alors désespérément à échapper à son destin en contactant tous les gradés possibles mais la machine est en marche. Ainsi en s’adressant à son capitaine, ce dernier lui répond :  » Ce sont des maîtres honnis qui nous ont envoyés mourir comme des esclaves. qui s’enchaînent eux-mêmes. Alors, dans cette avalanche de crimes, quelle importance peut bien avoir un crime infime – l’exécution du soldat longuement décrite en début d’ouvrage où Apostol est fier du devoir accompli – comme celui qui déchire ton âme aujourd’hui ? Qui se soucie encore de nos âmes ici ? ». S’expriment à la fois ici la force inévitable du destin et le caractère inutile du remord face à l’accomplissement du devoir même si celui-ci déplaît.

Aspostol arrive alors sur le front qui fait face à l’armée roumaine. Le voilà hébergé chez un fossoyeur dont il s’éprendra de sa fille. Et le fossoyeur de lui dire que son vrai métier est menuisier mais qu’en temps de guerre « on a toujours besoin d’un autre pour creuser sa tombe » mais que des cercueils « tout le monde peut en fabriquer ». Allusion fine signifiant qu’il ne faut pas juger une personne à l’activité qu’elle accomplit, car même si elle est ingrate, elle est utile…

En filigrane tout au long de l’ouvrage, le lecteur se heurte à la conquête de la liberté de l’homme : « deviens ce que tu es ». Les yeux du premier condamné hantent Apostol et c’est dans ses pupilles que brillent la lumière de cette liberté tant désirée. C’est cette quête de liberté et la fuite de son destin qui animent notre héros. Ainsi il déclare : »Il faut que l’homme soit seul avec son âme pour qu’il y ait équilibre entre son petit monde intérieur et le reste de l’univers; dès que la réalité intervient, l’homme devient un jouet impuissant, sans véritable volonté qui va là où le conduisent des forces et des volontés étrangères à son être… »

Il trouvera dans l’amour de la fille du fossoyeur un refuge temporaire à ses tourments. Mais le destin se rappellent à l’ordre et l’engrenage des événements se remet en place. Plutôt que de juger des roumains désertant son camps pour rejoindre les lignes adverses, il dira « non » et tentera de déserter. Condamné, il trouvera dans sa propre mort sa liberté. Apostol déclare ainsi : « L’âme a besoin d’une nourriture toujours renouvelée [...] Mais il ne faut pas chercher cette nourriture à l’extérieur, dans le monde des sens. Seul le cœur peut la trouver, soit dans un de ses recoins secrets soit dans un autre monde auquel nos yeux et nos oreilles n’ont pas accès. »

Ce roman fait réfléchir sur la nature humaine et la conquête de sa liberté que l’homme endort souvent derrière un progrès technique lui simplifiant la vie mais qui ne lui fait pas fonctionner ses neurones. Livre spirituel ou initiatique ? Non. Livre romantique ? Oui. Les sentiments y exultent tout en rappelant que la conquête « de sa légende personnelle » selon Paulo Coehlo passe par les tourments de l’âme et qui sait la mort…


Rougir d’être paysan de Michel et Joseph Gicquel

Jeudi 1 septembre 2011

L’austérité de la couverture et la photo en noir et blanc qui y est apposée laissent penser à un ouvrage de mémoires. C’est un peu le cas. Les deux auteurs et frères, Michel et Joseph Gicquel, font revivre aux nostalgiques et aux jeunes générations (les « digital natives » les mutations du monde paysan breton des années 60 et 70 : cette mutation qui a introduit la mécanisation et l’ère de l’industrialisation et la notion de rendements (volume et financier) dans l’agriculture et qui a boulversé le socle d’une société traditionnelle enraciné dans ses valeurs solides.

Les auteurs par un jeu d’écriture et un double je revisite au fil des chapitres de l’ouvrage des choses simples comme les loisirs des petits paysans, la simplicité des ouvriers agricoles, la télévision et les premiers émois d’une sexualité, sujet tabou que l’on abordait indirectement par la reproduction animale.

Point de nostalgie de la part de ses deux auteurs emprunts d’un profond respect pour leurs origines. Leur père, même s’il apparaissait comme quelqu’un de rigide, dur, et parcimonieux, inspire aux auteurs – bien des années plus tard quand on regarde dans le rétroviseurs de la vie – un profond respect. Ce père a la fois trempé de ses valeurs paysanne mais aussi ouvert au progrès : ses enfants mèneront de belles études et la télévision, la petite lucarne, ouvrira une grande fenêtre sur le monde dans cet univers clos.

L’oisiveté était une valeur détestable alors que la ferme requérait un travail permanent : s’occuper des bêtes, nettoyer leurs habitats, s’occuper des récoltes, etc. Les auteurs nous font pénétrer cet univers dur de manière tendre en évoquant leur attachement profond à leur mère et en dépeignant avec simplicité son décès : « Les soeurs avaient pris la décision de tout me dire. Elles m’avaient vu fondre en larmes à chaque fois que quelqu’un venait me rendre visite. Avaient-elles décidé de le faire, convaincues que je ne me faisais aucune illusion ? Ou était-ce le sentiment du devoir à accomplir qui les avait guidées, épargnant ainsi la famille cette tâche ingrate et difficile ? Le soir même, je me mis à penser, à laisser mon imagination galoper. Sans elle, désormais comment allais-je vivre ? Un grand vide s’ouvrait devant moi, une nouvelle vie aussi. Avec toujours la même envie, continuer la vie ». Je pense ici à la chanson « La vie c’est la vie » d’Henri Salvador dans son album Révérence qui évoque ce thème de manière si optimiste.

Les réformes agraires d’après guerre avaient inéluctablement détruit le socle commun de la paysannerie. Les paysans n’habitaient plus avec les bêtes pour profiter de leur chaleur. Le logement était à présent distinct des étables. Par soucis d’économie et après les dépenses générées par cette nouvelle construction et faute à une parcimonie latente, « le père » refusa d’installer le chauffage. Même si les conditions de vie s’amélioraient, les hivers demeuraient rigoureux. Un jour suite à un trajet en automobile pour se rendre à un carnaval d’une ville voisine, survint un accident. Arrivés à l’hôpital, leur soeur découvrit le pyjama crasseux d’un des frères sous ses vêtements « en pelure d’oignons », technique utilisée contre le froid mais synonyme de honte sociale mais aussi d’un archaïsme montrant le refus de changement de la société rurale face à un progrès très rapide.

Une autre citation se suffit à elle même pour montrer l’obstination et l’abnégation du paysan. Leur père travaillant se blesse en maniant la faux. Il se soigne avec de la gnôle et une « bande Velpeau ». Toutefois la plaie s’ouvre et « le père » doit se résoudre à aller se soigner. L’auteur résume, sur un plan plus large, ainsi l’état d’esprit de son père : « Un paysan travaille sans relâche parce qu’il a le sentiment de toujours mener un combat contre le temps, contre les intempéries qui pourraient mettre en péril l’exploitation et la survie de la famille. Il ne renonce jamais, par fiereté, par orgueil ou par simple sentiment d’obligation. Ce courage, cette abnégation m’ont donné des motifs d’indulgence et même d’absolution. Pour autant, ce sont bien diverses formes de barbarie qui sévissaient dans les campagnes et dans les fermes et rien, aujourd’hui, ne saurait en justifier aucune ».

Tout est dit et écrit… Cet ouvrage est donc une introduction autobiographique tendre au monde paysan breton. Cette relation froide mais intense avec les parents, les tabous édictés par la religion et les normes sociales, les plaisirs des jeux d’enfants si simples aujourd’hui et disparus au profit de l’écran, une description des rapports humains entre les enfants et les ouvriers agricoles d’alors. Cet ouvrage nous invite peut-être à regarder dans le rétroviseur pour regarder l’état de notre société, réfléchir sur son devenir et emprunter à ces valeurs des pierres pour la construction d’un édifice sociétal meilleur. C’est aussi un témoignage de la société bretonne traditionnelle que les « neo-breizhous » tentent de faire revire.


Absolument dé-bor-dée – Le paradoxe du fonctionnaire de Zoé Shépard

Mercredi 3 août 2011

Il existe de nombreux ouvrages qui ridiculisent l’administration. Les mêmes idées pourraient être aussi étendues au secteur privé. Les sociologues des organisations y trouveraient de nombreux terrains d’étude.

Zoe Shepard (nom d’emprunt) est chargé de mission dans une collectivité territoriale. Son ouvrage décrit une année d’activité dans cette administration au service des relations internationales. Elle y évoque son ambition du service public après le passage par une haute école de l’administration et les concours. Elle aborde sa désintégration fantasque dans son service où elle est affectée.

Elle se rend compte très vite que son service est « un univers impitoyable » où règne la stupidité et le « ne rien faire ». Pour être le mieux noté, mieux vaut ne pas se stresser : une note (une semaine), des conversions (des soucis avec la règle de trois), des instructions jamais comprises et à récupérer à la dernière minute. Tous les gens minutieux ou consciencieux connaissent…

Elle dénonce les frasques et les absurdités de son employeur en brisant l’omerta ce qui vaudra à l’auteur une mise à pieds, fait rarissime pour un fonctionnaire. Faisant appel, sa peine sera commuée en une simple suspension, tout de même…

Pierres Desproges sur scène (1985)

Pierres Desproges sur scène (1985)

Deux passages m’ont impressionné dans ce journal : la location entre collègues de monospace au meilleur tarif pour coucher avec tel ou telle collègue et une citation empruntée à Pierre Desproges relative à la nouvelle année que je reprends intégralement ici : « Qu’est ce que le 1er janvier, sinon le jour honni entre tous où des brasssées d’imbéciles joviaux se jettent sur leur téléphone pour vous rappeler l’inexorable progression de votre compte à rebours avant le départ vers le Père-Lachaise… Dieu merci, cet hiver, afin de m’épargner au maximum les assauts grotesques de ces enthousiasmes hypocrites, j’ai modifié légèrement l’annonce de mon répondeur téléphonique. Au lieu de « Bonne année à tous », j’ai mis « Bonne année, mon cul ». C’est net, c’est sobre, et ça vole suffisamment bas pour que les grossiers trouvent cela vulgaire » in Chronique de la haine ordinaire.

Je trouve que cette dernière citation résume l’esprit du livre : sobre, direct sans aucune hypocrisie. Je ne sais pas si ce journal était l’exutoire de l’auteur ou si au bout du compte elle est partie en Afrique construire une école. Mais ce pamphlet fait du bien car nous sommes tous confrontés à des situations similaires (aussi bien dans le privé que dans le public) et ce livre défoule allègrement et fait ressortir, je le pense, tout ce que l’on voudrait dire parfois à ses collaborateurs malgré une inhibition de bon sens.

Bref, un moment cynique et très drôle dans la « sinistrose ambiance » de nos vies professionnelles. A lire vite…


Qu’Allah bénisse la France d’Abd Al Malik

Lundi 28 février 2011

Si Abd Al Malik est connu pour ses albums (Dante, Gibraltar et Château Rouge), il est aussi écrivain. Remis en exergue (pour moi en ce qui me concerne), par Grand Corps Malade et son slam, j’ai découvert cet auteur/interprête/compositeur. Titulaire récent du prix Edgard Morin pour son ouvrage, la Guerre des banlieues n’aura pas lieu, mon billet traite de l’ouvrage cité dans le titre.

J’ai flâné dans les rayons libraires de la Fnac toulousaine et je suis tombé sur cet ouvrage. C’est un livre autobiographique qui parle de son enfance, de son adolescence et sa genèse d’adulte à Strasbourg dans les quartiers dits difficiles de la cité. Il décrit sa situation familiale : pas forcément des plus simples. Il raconte ses vols, source d’appartenance à un ou des groupes (sacré Maslow). Il parle enfin de sa rencontre avec l’islam. Au tout début zélé prosélyte au sein du mouvement du Tabligh, il se rend compte qu’un savoir fin de la religion musulmane ne répond pas à sa soif spirituelle.

Délits, dévotion soutenue sont autant de sources pour « être vivant » dans le quartier. Toutefois ces éléments ne répondent pas à la dualité de l’auteur. Qui plus est l’auteur vit par la musique et se voit invité à abandonner sa passion au nom de règles religieuses (ou humaines?)…. L’équilibre entre la vie profane et la vie sacrée oblige Abd Al Malik à jouer les Supermans (je change d’habits et/ou de masques) dans les « cabines téléphoniques ». Cette conciliation est un art subtil car cela oblige parfois à jouer les schizophréniques pour appartenir à tous les groupes en même temps. Mais l’auteur audite sa foi et son parcours de vie avec la raison et sa raison. Et la liaison du coeur et de la raison lui permet d’arriver à une synthèse spirituelle sur une voie plus fine de sa religion et une meilleure connaissance d’Homme et de l’Homme.

Une autre partie de l’ouvrage qui a fait écho en moi à la lecture du livre est la relation « maître/guide ». Je dirais plus personnellement : « accompagnant/accompagné ». Il évoque ainsi cette relation : « un maître spirituel n’est jamais un maître à penser ou un beau parleur mais quelqu’un  qui vous nourrit de son flux spirituel». Cela se traduit par une relation de confiance où le premier transmet au second pour que le second construise sa propre vérité. Une question est celle de la transmission (le quoi et le comment). Mais ceci est un autre débat au regard de cet article.

Pour conclure, c’est un libre intelligent à mettre entre toutes les mains notamment celles des jeunes qui se cherchent…


Un coin tranquille pour mourir d’Yvonne Besson

Mardi 14 décembre 2010

Marville est une petite provinciale de la côte normande. Mais depuis peu un enchaînement de différents faits divers laissent supposer l’existence d’un « serial killer » dans la bourgade. Le premier meurtre est celui d’une paysanne « inutile » égarée dans le bocage normand à laquelle personne ne prête pas attention. Le meurtre passe dans les « canards locaux » comme un fait divers. Mais le lecteur est entraîné par l’auteur, Yvonne Besson, dans le pathos de son tueur. Le récit est coupé de morceaux du journal intime qui explique les motivations de l’assassin, une sorte d’introspection expliquant les raisons de ses actes et le plaisir croissant qu’il éprouve à chaque meurtre. Je cite dans un billet précédent « pensées sombre du dimanche soir…sur la nature humaine » la vision quelque peu pragmatique du tueur sur la nature humaine. Le second meurtre se déroule dans un collège où un jeune professeur stagiaire, lui-même inutile, se suicide ou « est suicidé… ». L’auteur, elle même enseignante, fait passer ici un certain nombre de messages sur l’école et l’administration qui la supporte. Toutefois ces messages sont au second plan par rapport à l’évolution du tueur et de l’enquête pour sa traque. Mais les critiques sont justes. Le troisième meurtre est celui d’un handicapé, mari d’une professeur de Lettres au collège Aubin Corbier – collège de la ville – lui aussi également inutile. Le quatrième assassinat est celui d’un enfant poussé sous une voiture, enfant qui se trouvait là au mauvais endroit et au mauvais moment mais jugé inutile par le tueur. Le cinquième meurtre est quant à lui l’assassinat d’une professeure du collège déjà cité.

L’enquête est confiée au commandant Riou, femme policière, mutée de Marville à Rouen. Les femmes qui prennent du galon existent… Ce flic est la petite amie du libraire de la ville chez qui tous les professeurs de Marville viennent « s’approvisionne »r. Elle doit mener ses investigations dans la corporations enseignante, lieu de toutes les passions liées à ce métier et support des messages de l’auteur sur l’école. Les chapitres du roman nous laissent avancer avec elle dans son enquête. Le lecteur pense toujours avoir affaire avec le tueur en série mais, plus le lecteur va vers la fin du livre, plus ce qui semblait évident ne l’est pas. Le récit fait apparaître deux histoires parallèles : une simple histoire familiale expliquant l’un des meurtres et un récit fictif s’inspirant de faits divers produits dans la région pour les autres. Grosse déception à titre personnel… Je préférais l’hypothèse du tueur en série.

J’admire les qualités de l’auteur dans son écriture qui fait tomber le lecteur dans le piège du tueur en série pendant les deux tiers du livre. Toutefois l’ouvrage s’allonge et sa lecture devient fastidieuse au bout de trois cents pages. Le lecteur dans ce genre d’ouvrage souhaite à mon avis un dénouement rapide. C’est à titre personnel la faiblesse de l’ouvrage. Mais c’est aussi sa force car la conclusion est pour le moins déroutante et est « tirée par les cheveux ». Je pense que le public cible idéal de ce roman sont les enseignants du secondaire amateurs d’histoires policières. Par contre, j’ai particulièrement aimé l’introspection du tueur qui est fine. Sa propre analyse est à la fois pertinente et traduit parfaitement son escalade dans le plaisir. Personnellement, c’est tous les passages où notre tueur hypothétique s’analyse qui m’ont le plus plu. Cela m’inquiète…