Archive pour la catégorie ‘Lectures’

Pensées sombres du dimanche soir… sur la nature humaine

Dimanche 7 novembre 2010

« Aimer son prochain comme soi-même, la petite phrase que l’on m’a inculquée dès mon plus jeune âge continue à me transpercer la cervelle, litanie stupide, précepte dérisoire. Personne n’aime personne. On n’aime que soi. On joue la comédie pour que la cohabitation soit tolérable, on invite à la haine qui nous dévore des excuses grandioses. Je te détruis parce que mon dieu me l’a ordonné, je te trucide parce que tu vis sur mon territoire sacré. Moi au moins, j’ai l’honnêteté de ne plus chercher de vains prétextes. Le moustique qui me bourdonne aux oreilles me dérange ? J’aplatis le moustique. C’est pourtant une créature de Dieu, le moustique, non ? Grande vanité de l’être humain de se croire supérieur au moustique ! J’aplatirai donc sans scrupule l’humain si sa présence à mes côtés me gêne. C’était bien ça, le déclencheur quand j’ai tapé sur le crâne de ma cousine Marguerite avec la bouteille. Inutile d’ergoter. La différence notable est que j’éprouve plus de plaisir à la mort d’un de mes semblables qu’à celle du moustique… »

In Un coin tranquille pour mourir d’Yvonne Besson

« Un anthropologiste qui était allé étudier les Pygmées constata avec stupeur que les tribus qui vivaient alentour le dédaignaient et le tenaient à l’écart, parce qu’il frayait avec une peuplade inférieure, les Pygmées étant à leurs yeux des gens de rien, des « chiens », indignes d’éveiller le moindre intérêt.
Il n’y a pas plus exclusiviste qu’un instinct vigoureux, inentamé. Une communauté se consolide dans la mesure où elle est inhumaine, où elle sait exclure… Les « Primitifs » y excellent. Ce ne sont pas eux, ce sont les « civilisés » qui ont inventé la tolérance, et ils périront par elle. Pourquoi l’ont-ils inventée ? Parce qu’ils étaient en train de périr… Ce n’est pas la tolérance qui les a affaiblis, c’est leur faiblesse, c’est leur vitalité déficiente qui les a rendus tolérants ».

In Ebauche de vertige de E.M.Cioran


L’ouragan de Laurent Gaudé

Jeudi 21 octobre 2010

Ouragan est le dernier roman de Laurent Gaudé (photo de l’auteur) paru chez Actes Sud en août 2010. Il a obtenu en 2004 le prix Goncourt pour son ouvrage : Le soleil des Scorta

Ce roman est l’histoire croisée de différents personnages qui peuplent la Louisiane et le Texas. Nous y retrouvons une négresse hors d’âge (Josephine Linc. Steelson), un prêtre, un couple qui se retrouve et des prisonniers.

La « sale chienne » arrive. Elle va tout dévaster sur son passage. La tempête sert de trame de fond pour faire évoluer ces personnages. Elle permet à l’auteur de faire une analyse psychologique fine de tous ces individus. L’auteur met aussi en évidence – à mon avis – les faiblesses du modèle américain : le traitement des noirs, l’abandon des prisonniers dans leur centre pénitencier. Tous les gueux et les vilains de la Nouvelle-Orléans seront évacués depuis le stade principal afin de montrer que l’Etat (pour se donner bonne conscience) pense à tous ses concitoyens…

Ce qui est intéressant de noter, c’est aussi l’évolution de tous ces personnages qui se cherchent : les uns un amour perdu, les autres : une rédemption ou tout simplement la liberté.
Le livre suit une progression par chapitre où chaque paragraphe constitue une avancée dans l’histoire d’un personnage.

Si le lecteur cherche un roman montrant La Nouvelle Orléans et une description précise de la ville avant, pendant et après la tempête il passera son chemin. Des péripéties ? Aucune. L’action est très lente pour peut-être faire contrepoids à la violence de la tempête.

Dans l’écriture, tout est la troisième personne du singulier ou du pluriel. Cette méthode d’écriture permet une distanciation entre les personnages de l’auteur et le lecteur. C’est un peu comme si nous étions dans un « loft story like » où le lecteur est le spectateur de tous ces personnages. Peut-être l’auteur a-t-il voulu que nous soyons des voyeurs et que la Nouvelle-Orléans sous la tempête soit la scène du spectacle.

Personnellement, j’ai attendu la centième page (sur deux cents) pour « rentrer » dans le livre et « l’achever ». Le lecteur devra donc être patient pour un ouvrage qui ne restera pas impérissable. Mieux vaut privilégier son emprunt plutôt que son achat (prix : dix huit euros toutes taxes comprises).

Vous pouvez acheter le livre sur les sites suivants :

Amazon,
Fnac.

ou l’emprunter à la bibliothèque de Toulouse